LE MUR DE BAMBOU. Le Cambodge après Pol Pot

 

LE MUR DE BAMBOU. Le Cambodge après Pol Pot

LUCIOLLI Esmeralda

Edité par Régine Deforges / Médecins sans Frontières, Paris, 1988

 

Après la Chambre des Représentants le 2 octobre 1998, le Sénat des Etats-Unis s'apprête à voter, en janvier 1999, une résolution demandant la condamnation de Hun Sen pour violations graves des lois internationales sur les droits de l'homme. Les observateurs de la situation politique au Cambodge ont intérêt à lire ou à relire l'ouvrage intitulé "Le Mur de Bambou - Le Cambodge après Pol Pot" par le docteur Esmeralda Luciolli, publié en 1988 aux Editions Régine Deforges - Médecins sans frontières.

En voici les extraits les plus significatifs: LE MUR DE BAMBOU



La décision de construire ce qui serait bientôt appelé le "mur de bambou" ne fut jamais annoncée publiquement. En juillet 1984, des rumeurs mystérieuses, dont des bribes arrivaient jusqu'à nous, se propagèrent parmi les Cambodgiens. Chacun devrait désormais se rendre sur la frontière, plusieurs mois par an, dans des régions minées et fortement impaludées, pour construire une sorte de nouvelle muraille de Chine entre le Cambodge et la Thaïlande. L'idée paraissait si folle que beaucoup d'étrangers ne voulurent y voir que l'expression de l'exagération qu'ils prêtaient aux Khmers. Au bout de quelques semaines, il fallut pourtant se rendre à l'évidence: les départs commençaient et ces travaux allaient bientôt devenir la hantise de tous les Cambodgiens.


L'armée vietnamienne a pris l'habitude d'enrôler des civils khmers pour des travaux d'ordre stratégique depuis 1979. Dans un premier temps, à partir de l'automne 1982, la population a dû participer au "travail socialiste". Ces travaux consistant à construire des digues, des routes, des terrassements se déroulaient à proximité du domicile et s'avéraient utiles pour les habitants. Très vite, ces ouvrages ont pris un caractère stratégique et les paysans ont reçu l'ordre de défricher les forêts environnantes et de construire des barrières de protection autour des centres d'habitation les plus importants. Depuis 1983, les habitants doivent construire des palissades faites de deux ou trois rangées d'épineux, de bambous, parfois doublées de champs de mines, autour des villages. La population est également contrainte d'édifier des barrières défensives le long des voies ferrées, autour des ponts et aux points stratégiques des grandes routes. (...) Toutefois, les premières corvées duraient peu de temps et n'entraînaient aucun déplacement de population.


En 1984, une nouvelle étape a été franchie: toute la population du pays a été mobilisée pour de gigantesques travaux désignés officiellement comme "travaux de défense de la patrie". Au début de cette année-là, les autorités vietnamiennes ont décidé de boucler la frontière thaïlandaise. L'offensive de la saison sèche 1984-1985 avait détruit les principaux camps de la résistance situés dans cette région. Pour consolider cette victoire, il fallait fermer hermétiquement le pays aux infiltrations de la guérilla et empêcher la population de fuir vers la frontière.


La décision d'ériger, dans ce but, une "ligne de défense"de huit cents kilomètres de long a été prise à Hanoi, début 1984, par le Comité Central du Parti Communiste Vietnamien. [Voir Marie-Alexandrine Martin, "Cambodge, une nouvelle colonie d'exploitation", Politique Internationale, juillet 1986 et "The military occupation of Kampuchea", Indochina Reports, septembre 1986]. La construction de ce "mur"asiatique devait s'opérer en plusieurs étapes: d'abord le défrichage d'une bande de terrain de trois à quatre kilomètres de large le long de la frontière, dans les forêts et les montagnes, puis le percement de tranchées, l'élévation de digues, la construction de palissades en bambou doublées de barbelés et de champs de mines, enfin, l'ouverture d'une route stratégique longeant le "mur", destinée à acheminer troupes et munitions et à surveiller la frontière.


Les autorités cambodgiennes ont été chargées d'exécuter le projet. Tout porte à croire que ces travaux devaient être réalisés le plus rapidement possible, quels qu'en soient le coût en vies humaines et les conséquences économiques, pour "lutter contre les bandits polpotistes de la forêt qui, depuis la destruction de leurs camps tout au long de la frontière thaïlandaise, s'infiltrent dans le pays pour voler de la nourriture et satisfaire leurs maîtres à Pékin ou à Washington". [Radio Phnom Penh, 21 septembre 1896]. Ces travaux d'Hercule évoquent ceux, gigantesques, entrepris du temps de Pol Pot. Les dirigeants actuels n'ont-ils pas un passé et une idéologie communs avec les responsables du régime précédent?

La réquisition des civils a commencé en septembre 1984. Les Cambodgiens parlent souvent du départ au "défrichage"comme d'un nouveau "17 avril". [Le 17 avril 1975 marque l'entrée des Khmers rouges à Phnom Penh et, pour la plupart des Cambodgiens, le début d'un calvaire].


Les travaux sont désignés par un sigle mystérieux: "K5", dont les Cambodgiens interrogés ignorent la signification. Chaque province du pays se voit confier la tâche de construire une portion de mur. Elle recrute deux à trois fois par an un contingent de travailleurs dits "volontaires" pour des périodes de trois à six mois, selon un quota fixé par le gouvernement central proportionnellement à sa population. Les provinces, à leur tour, déterminent les quotas pour chaque district, les districts font de même pour les communes et les communes pour les villages. En principe, on ne réquisitionne que les hommes âgés de 17 à 45 ans mais il arrive fréquemment que des femmes ou des adolescents soient désignés, faute d'autre personne disponible dans la famille. Pour l'ensemble du pays, chaque départ rassemble, en moyenne, 100.000 à 120.000 personnes. (...)

D'après un fonctionnaire du ministère de la Défense réfugié en Thaïlande, les travaux sont, au niveau national, sous la responsabilité directe de Bou Thang, de Hun Sen et de Heng Samrin, respectivement ministre de la Défense, Secrétaire général du Parti et Président de la République. (...)


A l'arrivée (sur les chantiers), rien n'est prévu pour accueillir et abriter les travailleurs. "Quand nous sommes arrivés," raconte Touch Sareun (un participant), "des milliers de travailleurs nous avaient précédés. Nous étions peut-être dix mille, venant de plusieurs provinces. Il n'y avait aucun abri. Il était inutile de chercher à se construire une hutte, car nous nous déplacions tous les jours. Certains avaient des hamacs, d'autres n'avaient rien. Ils dormaient par terre, sur un morceau de plastique ou à même le sol."(...)

La nourriture demeure très insuffisante. (...) Les réserves s'épuisent vite. "On nous avait dit qu'il y aurait tout ce qu'il fallait sur place, raconte un villageois de Takeo. Mais une fois arrivés, il n'y avait presque rien à manger."(...) Dans le groupe de Thory, une jeune femme de Battambang, "plusieurs personnes sont mortes du manque de nourriture. C'était comme sous Pol Pot." (...)


Il est interdit de chercher à trouver de la nourriture pendant le travail. Un Khmer Krom qui a participé au défrichage dans la région de Non Sap, chantier réputé très dur, rapporte : "Un jour, je m'étais éloigné un peu pour essayer de pêcher dans une mare. Les soldats m'ont vu. J'ai été pris et longuement battu. Cela arrivait souvent, car beaucoup de gens avaient faim. (...)

L'administration locale est, par endroits, incapable de subvenir à la nourriture des travailleurs. Ces rations de misère doivent pourtant suffire à exécuter un travail épuisant et dangereux: les "volontaires"doivent défricher des terrains minés, creuser des tranchées, construire des routes, transporter du matériel, des munitions, des cadavres, déminer le terrain et le reminer le long du "mur"

Partout, les témoignages sont identiques, les travailleurs sont répartis en petites équipes et ils travaillent de huit à dix heures par jour. Chacun se voit assigner une quantité déterminée de travail à accomplir dans la journée, faute de quoi les punitions, telles que les coups ou des corvées supplémentaires, sont fréquentes. A Samrong, Nong Rus devait "défricher, transporter des caisses de munitions et parfois des cadavres de soldats ou de travailleurs qui avaient sauté sur une mine."(...)
Les chantiers étaient surveillés par des soldats khmers, eux-mêmes supervisés par l'armée vietnamienne. La fuite, pratiquement exclue, est impossible de jour et très risquée de nuit, en raison des mines. Plusieurs réfugiés racontent avoir été parqués, pendant la nuit, sur des terrains entourés de mines. "Toute tentative d'évasion équivalait à un suicide. Une ceinture de mines avait été posée autour du campement, auquel on n'accédait que par un étroit sentier. Quelques soldats vietnamiens suffisaient à nous surveiller" raconte Chhay. Dans un autre groupe, "soixante-dix personnes ont reçu l'ordre de surveiller les autres. On leur a donné des fusils. Ils étaient eux-mêmes surveillés par les Vietnamiens. Si quelqu'un essayait de fuir, il était souvent abattu sur place. D'autres ont été pris et emmenés en prison à Battambang."


Sunnara, de Prey Veng, a été obligé de garder les "volontaires". "Nous n'avions pas le choix, les Vietnamiens étaient derrière nous. Les rares personnes qui essayaient de s'enfuir étaient rattrapées et sauvagement battues, puis emmenées en prison. Certaines ont été exécutées."
Sareth, de Pursat, déminait: "Souvent ceux qui sautaient sur des mines étaient accusées de vouloir s'enfuir. En réalité, c'étaient des accidents, car nous ne savions pas du tout où étaient les mines. (...)

Depuis le début des travaux, en septembre 1984, le plan K5, que certains ont qualifié de "nouveau génocide", a fait des dizaines de milliers de victimes. [Voir "Un nouveau génocide", Philippe Pacquet, La Libre Belgique, 26 mai 1986].


Les accidents dûs aux mines sont nombreux. Personne ne sait plus où elles se trouvent car la frontière khméro-thailandaise a été minée successivement, depuis des années, par les Khmers rouges, par les Vietnamiens, et par les résistants non communistes. (...)


De très nombreux décès sont intervenus sur le chantier de Non Sap, la première année des travaux, à la fin 1984. "On trouvait des cadavres dans plusieurs endroits", raconte Thory. "Nous devions les brûler. Parfois je devais transporter des munitions sur des distances assez longues. Le long du chemin, dans la forêt, nous trouvions les corps des travailleurs qui nous avaient précédés et qui avaient sauté sur des mines." Son témoignage est confirmé par d'autres personnes ayant travaillé dans la même région. Dans le groupe d'un villageois de Bavel, dix personnes sont mortes ainsi, dans un autre groupe, huit.


Il arrive que des camions transportant les "volontaires" sautent sur des mines. Dans le convoi de Sitha, deux camions ont été désintégrés. Sur la centaine de personnes que contenait chaque camion, plus de la moitié sont mortes et la plupart des autres blessées. En mars 1985, en allant à Pursat, un infirmier de Prey Veng a vu exploser le camion qui précédait le sien. Une vingtaine de "volontaires"ont été tués et une cinquantaine blessés. (...)

Les victimes des mines ont peu de chance de survivre à leurs blessures. Les postes de secours installés sur les chantiers ne disposent ni du personnel, ni du matériel nécessaire pour les soigner. Il faut parfois plusieurs jours pour évacuer un blessé à l'hôpital provincial le plus proche. De plus, les médecins compétents en chirurgie sont rares. Comme tous leurs confrères ils consacrent une partie de leur temps à des activités politiques et ne sont pas toujours disponibles. A supposer qu'ils le soient, ils ne disposent ni de sang, ni d'antibiotiques, ni d'oxygène, ni même, parfois, de compresses et de désinfectant. Les blessés graves meurent. (...)


En 1985, à Kandal, une centaine de blessés du premier contingent sont morts et des dizaines d'autres ont été amputés. A Prey Veng, cinquante-six travailleurs du second contingent sont morts sur les mines. (...)


Pourtant, ce ne sont pas les mines qui causent le plus grand nombre de pertes en vies humaines, mais le paludisme. Cela n'a rien de surprenant, alors que les zones où se déroule le défrichage sont connues pour être infestées par le paludisme. (...) Depuis le début des travaux de la frontière, il se produit le même phénomène que lors des déportations du temps des Khmers rouges: les "volontaires" [venant des plaines centrales dans lesquelles le paludisme est rare en temps normal], transplantés du jour au lendemain dans des régions fortement impaludées, sont très sensibles à la maladie. La quasi-totalité d'entre eux est parasitée en peu de temps et le développement de formes graves est favorisé par la sous-alimentation et l'épuisement. Tous les témoins parlent du paludisme comme d'un véritable fléau. De plus, une fois malades, les "volontaires"sont contraints de continuer à travailler jusqu'aux limites de leurs forces. (...)

Alors qu'au début, le plan K5 était très secret et peu abordé à la radio, dès mi-1985, des échos semblables à ceux célébrant l'enthousiasme sur les chantiers du régime khmer rouge se sont fait entendre: "Notre peuple vit maintenant dans la joie. Il s'efforce de surmonter tous les obstacles en participant volontairement aux travaux de défense de la patrie, construisant en même temps une nouvelle vie sur cette terre dont il est devenu le maître." [Radio Phnom Penh, 22 août 1986]. (...)

De tous les contingents, le premier, parti en septembre 1984, a été le plus durement touché. Ces premiers "volontaires" ont été décimés par le paludisme, la faim et les mines. Tout au long du premier semestre de 1985, des dizaines de milliers de travailleurs sont revenus chez eux, tant bien que mal. (...) Lors de nos sorties en province, le spectacle des dispensaires évoquait la frontière thaïlandaise en 1979: partout, des hommes malnutris, épuisés, souvent entassés à même le sol. Partout où nous allions, dans les provinces, dans les districts, 80 à 90% des "volontaires" revenaient malades. La mortalité était très élevée, de l'ordre de 5 à 10%. A Kandal, sur 12.000 travailleurs, il y a eu 9.000 cas de paludisme et 700 décès. Dans un district de Takeo, sur 1.100 partants, on comptait 900 cas de paludisme et 56 décès. Dans un district de la province de Kompong Chhnang, 10% des "volontaires" avaient succombé à la maladie. [Voir "Malaria decimates border workers", AFP, Lucien Maillard, 27 août 1985; "Forced human bondage", Far Eastern Economic Review, 22 août 1985; Marie-Alexandrine Martin, "Une nouvelle colonie d'exploitation", Politique internationale, été 1985]. (...)

Certains cadres, disait-on, manifestaient une certaine opposition à poursuivre les travaux sans souci du coût en vies humaines. Le Premier ministre lui-même, Chan Sy, aurait été de ceux-là, raison pour laquelle de nombreux Cambodgiens considèrent sa mort soudaine en 1985 comme suspecte. (...)

Le bilan des deux premières années du plan K5 est lourd. Selon les estimations les moins alarmistes, un million de personnes au moins ont participé aux travaux de septembre 1984 à fin 1986. [Le neuvième contingent est parti en octobre 1986. Rappelons que chaque contingent comporte, en moyenne, 120.000 personnes]. Le taux de mortalité dû au paludisme se situe autour de 5% et il y aurait donc eu au minimum 50.000 morts durant cette période. Selon un fonctionnaire du ministère de la Défense, réfugié en Thaïlande, ses services estimaient, en mars 1986, que 30.000 personnes étaient décédées depuis le début des travaux. Ce bilan ne tient pas compte des dizaines de milliers de malades et de blessés ni des infirmes. (...)


A l'orphelinat des "petits", à Phnom Penh, le nombre d'abandon d'enfants a considérablement augmenté depuis le début des travaux. La mort du mari au défrichage représente le principal motif invoqué par les mères qui ne peuvent plus à la fois travailler et s'occuper de l'enfant. (...)

Au cours de nos sorties en province, il était de plus en plus rare de voir des hommes travailler dans les champs et la majeure partie du temps, des femmes plantaient, repiquaient ou moissonnaient, seules. Dans chaque foyer, le départ d'une personne, le plus souvent un homme, pendant de longs mois, fait baisser la production familiale et même à leur retour, les hommes n'ont souvent pas la force de retravailler avant plusieurs semaines. (...)


[Courant 1985, selon un fonctionnaire du ministère de l'Agriculture], 60 à 70% seulement des rizières cultivées l'année précédente avaient pu être ensemencées, la main d'oeuvre étant considérablement réduite par les réquisitions pour le défrichage, l'armée et les milices de défense villageoises. (...) Fin 1985, le ministère de l'Agriculture prévoyait un déficit de 250.000 tonnes de paddy pour la récolte à venir. (...) La mobilisation générale de la population pour les travaux de la frontière a pris une bonne part de responsabilité dans le déficit agricole. (...)


Nul doute que, de tous les aspects de l'occupation vietnamienne, le plan K5 constitue le plus inquiétant. Officiellement, la construction du mur répond à la nécessité de défendre le pays contre les infiltrations de la résistance basée à la frontière khméro-thaïlandaise. (...) A supposer même que la résistance constitue une véritable menace pour Phnom Penh, tous les experts militaires, tous les observateurs, s'accordent à dire que le "mur", une simple palissade en bambou est inapte à arrêter les infiltrations. Par ailleurs, aucune ligne de défense n'est efficace si elle n'est gardée sur toute sa longueur. La construction elle-même avance beaucoup plus lentement que prévu et, trois ans après le début des travaux, seuls quelques tronçons sont achevés. (...) La ligne de défense ne saurait donc jouir d'aucune crédibilité stratégique pour ce qui est des infiltrations extérieures.

Dans ces conditions, il convient sans doute de chercher ailleurs les raisons de cette extravagance meurtrière. La "ligne de défense", si elle ne gêne pas les résistants, constitue en revanche un obstacle réel à la fuite de la population vers la Thaïlande. (...)

Parmi les Cambodgiens, certains attribuent d'autre part aux Vietnamiens l'intention d'éliminer par ce moyen, insidieusement, une partie des forces vives du pays. On peut d'autant plus mettre cet argument en doute que la construction du mur, par ses méthodes, rappelle surtout les Khmers rouges. En revanche, il est indéniable que cette entreprise permet au régime de maintenir la population dans un état de mobilisation permanente, et c'est peut-être là qu'il convient d'en rechercher la justification principale.


Quoi qu'il en soit, le plan K5 apparaît comme une entreprise stratégiquement absurde, commandée avant tout par des considérations de politique intérieure, difficilement avouables, dont le peuple khmer a déjà payé le tribut en dizaines de milliers de vies humaines. [Voir "A fence to be tested", Jacques Beckaert, Bangkok Post, 15 mai 1986 et "The military occupation of Kampuchea ", Indochina Report, September 1986]. Peut-être n'est-ce pas là l'une des moindres contradictions de ce régime qui appelle, pour nombre de Cambodgiens, la comparaison avec les Khmers rouges.

En 1986, des milliers de réfugiés sont arrivés à la frontière khméro-thaïlandaise. La peur de retourner aux travaux de "défense de la patrie" venaient en premier parmi les motifs qui les avaient poussés à fuir. (...) Malgré les témoignages de ces réfugiés, le plan K5 a suscité peu d'intérêt à l'étranger. Quelques rares journalistes [le premier à en avoir longuement parlé dans un quotidien français est Jean-Claude Pomonti, dans un article intitulé "Le mur vietnamien" paru dans le Monde daté 5-6 mai 1986] ont fait état des travaux, sans provoquer de réaction internationale à cette nouvelle tragédie du peuple khmer. Peu avant mon départ de Phnom Penh, un Cambodgien me confiait, amer: "On n'a rien fait pour nous à l'époque de Pol Pot, alors maintenant, vous pensez bien !"



16/08/2014
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